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Panneaux photovoltaïques légers: de nouvelles perspectives marché?

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Plusieurs segments de marché peuvent bénéficier de panneaux photovoltaïques légers. Du BAPV aux drones solaires, ces marchés exigeants offrent de grandes possibilités pour les produits innovants. Infinergia a défini un ensemble d'indicateurs clés de performance et les a appliqués sur plusieurs entreprises pour mettre en évidence leurs avantages concurrentiels.

Article par Antoine CHALAUX & Fabrice POULIN

 

Si nous laissons de côté le marché de masse des installations photovoltaïques au sol, le choix des panneaux photovoltaïques ne repose pas uniquement sur l'efficacité énergétique ou du cout actualisé de l'énergie (LCOE)1. Un nouveau critère entre souvent en ligne de compte : le poids.

Dans le domaine du photovoltaïque appliqué aux bâtiments (BIPV ou BAPV)2, les systèmes PV doivent répondre aux mêmes critères que les autres éléments du bâtiment, notamment ne pas menacer la solidité de la structure et ne pas présenter de risque pour les personnes à l'intérieur du bâtiment. Au-delà du risque d'incendie, le poids des panneaux PV et des éléments nécessaires à leur installation est un obstacle majeur à l'adoption généralisée du BAPV.

Pour relever ce défi, la société française Photowatt a développé le module Solight, dont les performances sont similaires à celles de son offre standard, mais dans une enveloppe deux fois plus légère. 2CA, une autre société française, est allée plus loin et a lancé Operasol, un module trois fois plus léger que les modules standard en silicium cristallin. Outre les bâtiments, il est suffisamment léger pour être installé sur des tentes, par exemple pour des applications militaires ou des secours en cas de catastrophe.

Au delà des modules cristallins, les modules photovoltaïques à couche mince3 sont des solution connus pour leur légèreté intrinsèque et qui peuvent être déployés sur n'importe quelle structure. Les modules PowerFLEX de la société américaine Global Solar (maintenant dans le groupe Hanergy), par exemple, sont plus légers (au m²) qu'Operasol et sont flexibles. D'autre part, la société allemande Heliatek utilise une technologie récente appelée technologie photovoltaïque organique (OPV) pour franchir une nouvelle étape avec des modules presque quatre fois plus légers que le PowerFLEX. De même pour la société française Armor et son offre ASCA. Outre leur faible poids, ces produits sont rapides à installer et peuvent également couvrir des façades verticales. Ils permettent d'aller beaucoup plus loin dans l'intégration du photovoltaïque dans les bâtiments.

 

 

Performance des panneaux solaires basés sur la technologie silicium cristallin  (Source: Infinergia)

Afin de distinguer les avantages et les inconvénients de ces technologies, nous avons défini un ensemble d'indicateurs clés de performance (KPI en anglais) pour les comparer simplement. Si le rendement des modules (watt par m² dans des conditions standard) est toujours pertinent, certaines applications privilégient plutôt une bonne densité de surface (kg par m²) ou un rapport puissance/poids élevé (watt par kg). Ces KPI permettent d'avoir une perspective différente des technologies PV par rapport à ce à quoi nous sommes habitués.

Parmi les applications qui peuvent bénéficier de solutions légères, les caravanes et les bateaux constituent un marché historique (de niche) pour les panneaux photovoltaïques. L'innovation est très présente et les entreprises proposent désormais des emballages légers, flexibles et très résistants (capables de résister à l'environnement marin). Parmi elles, Gioco Solutions et Solbian, basées en Italie, proposent les cellules de silicium cristallin très efficaces, emballées sur un polymère flexible ou une fine feuille d'aluminium.

Mais le photovoltaïque léger peut également ouvrir de nouveaux débouchés. Comme l'a prouvé le projet Solar Impulse en 2015, le photovoltaïque peut fournir suffisamment d'énergie pour alimenter un avion léger. Même si nous sommes encore loin de voir des avions commerciaux alimentés uniquement par l'énergie solaire, le PV peut déjà alimenter des drones et véhicules aériens sans pilote (UAV) pour un vol d'une journée. La start-up française Sunbird a commencé à commercialiser ce type de drones PV pour la surveillance des infrastructures ou de l'agriculture.

Avec des lignes pilotes en fonctionnement, AltaDevices et Flisom proposent des modules PV ultra-légers et efficaces qui pourraient étendre les possibilités des drones à énergie solaire sur ce marché très dynamique. Mais ces start-ups de haute technologie ou "Deep Tech" 4 vont encore plus loin. Selon elles, leurs technologies sont suffisamment efficaces pour recharger partiellement des voitures ou des camions électriques5. Nous doutons que cela fasse une différence appréciable pour les utilisateurs mais ces applications émergentes ouvrent la voie à la démocratisation de ces technologies.

 

 

Performances des technologies alternatives au silicium cristallin  (Source: Infinergia)

Alors que la tendance la plus notable de l'industrie photovoltaïque au cours des cinq dernières années est la réduction des coûts pour les centrales électriques au sol à grande échelle, les nouvelles technologies légères pourraient faciliter la pénétration du photovoltaïque dans de nombreuses autres applications. Elles ne concurrenceront pas les leaders (chinois) du marché sur les applications de masse, mais elles ouvriront de nouvelles opportunités là où le PV a une valeur ajoutée plus élevée. La question est maintenant de savoir à quelle vitesse et à quelle échelle ces applications peuvent se développer. Et quelle entreprise réussira à satisfaire cette nouvelle demande ?


[1] En Anglais : Levelised cost of energy, voir Wikipedia

[2] BIPV = PV intégré au bâti, BAPV = PV appliqué sur le bâti

[3] Les matériaux utilisés pour faire des panneaux à couches minces sont historiquement le silicium amorphe (a-Si), puis le Cd-Te et le CIGS et plus récemment l'OPV.

[4] Technologies qui prennent entre 5 à 10 ans avant d'être industrialisées, voir article en anglais "Strategies that make a difference for photovoltaic panel manufacturers" de Fabrice Poulin − lien

[5] Alta Devices revendique qu'une Toyota Prius équipée avec 1.2m2 de toit solaire pourrait générer 1.5 kWh / jour dans des conditons optimales (ce qui représente moins de 10 km d'autonomie pour une voiture totalement électrique)

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